J’ai été un peu moins régulier dans la publication d’articles au mois de juin en raison de la course contre la montre qui s’est imposée pour quitter le territoire chinois avant le 25 juin et parcourir les 4000km qui me séparaient encore du Kazakhstan. Malgré le timing serré, je ne voulais pas manquer une halte à Chengdu, ville jumelée avec Montpellier depuis plus de 35 ans !
Arrivée à Chengdu : chaleur et camping dans la ville
Dimanche 5 Mai au soir après avoir fait une vingtaine d’heures de voiture pour descendre des montagnes à 4700m, j’arrive à Chengdu. La descente en voiture me permet de gagner plusieurs jours de vélo et d’arriver à temps à Chengdu. J’étais en effet attendu tout début Juin pour rendre visite aux enfants de Montpellier School et également visiter la Maison de Montpellier à Chengdu.
Ma première surprise en arrivant à Chengdu est la chaleur étouffante. Alors que les nuits dans la montagne sont inférieures à 10 degrés, il faisait encore plus de 30 degrés à 23h à Chengdu. Mes compagnons de voyage me conseillent de prendre un hôtel à 150RMB (18€ environ) mais il est hors de question que je paye aussi cher alors que je sais que je peux trouver des guesthouses à 8RMB par nuit. Je décide de planter ma tente entre une avenue et une base militaire. La base militaire est en effet entourée de mauvaises herbes montantes et d’arbres qui permettent de dissimuler ma tente et mon vélo. Le lendemain, je partirai en quête de wifi pour réserver une guesthouse. J’essaye d’utiliser l’application chinoise équivalente à Booking.com pour trouver ma guesthouse à 8RMB mais impossible de savoir où cliquer puisque tout est en chinois. Je me résigne finalement à utiliser booking.com et trouve une guesthouse à 15RMB disponible pour deux nuits. En arrivant sur place, je m’aperçois que j’ai réservé une tente sur le toit (mais ça me convient très bien!) et le manager me dit qu’il n’y a pas de problème si je veux rester plus de deux jours puisqu’il vient de recevoir une seconde tente. Parfait !
Chengdu : visite de Montpellier School et interviews en rafale !
En 1981, Montpellier devient la première ville jumelée avec Chengdu. Depuis 30 ans, Chengdu s’est énormément développée et est aujourd’hui une grande mégalopole riche et prospère. Ces dernières années Montpellier et Chengdu ont travaillé à développer les échanges. En 2014, la municipalité de Montpellier a inaugurée “l’école de Chengdu” qui prodigue notamment aux élèves des cours de Chinois. Un an plus tard, c’est l’école publique “Montpellier School” qui a été inaugurée en grande pompe à Chengdu en compagnie de quelques élus français ayant fait le déplacement pour l’occasion.
Les élèves de Montpellier School sont âgés de 6 à 9 ans et sont initiés au français. Ils sont également partis 10 jours en France pour visiter leurs camarades de Montpellier et faire un peu de tourisme à Paris.
Lorsque je rends visite aux élèves, ils m’acceuillent avec de grands “Bonjour !”. Certains écoliers se présentent également en français. Je leur raconte ensuite mon périple à vélo en Chine. Les employées de la Maison de Montpellier traduisent instantanément en chinois de façon à ce que les élèves puissent comprendre. La classe était très bruyante à mon arrivée mais mon récit semble intéresser les élèves qui sont momentanément silencieux pour écouter la traductrice. Je n’ai pas sitôt fini de raconter mon histoire que des dizaines de mains commencent à se lever. Les élèves lèvent la main droite en soutenant leur coude de la main gauche. Une manière respectueuse en Chine ? Aucune idée… Les questions fusent : “Est-ce que tu dors dans la montagne avec ta tente?”, “Qu’est ce qui te fais le plus peur?”, “Où est-ce que tu manges?”, “Combien d’heures et de kilomètres fais-tu par jour?”, “Est-ce que ce n’est pas trop fatiguant?”, “Comment fais-tu pour traverser la mer à vélo?”…
Nous descendons ensuite tous ensemble dans la cours pour voir le vélo et prendre une photo de groupe. Le gros klaxon offert par Decathlon Odysseum rencontre encore une fois un grand succès, presque autant qu’au Vietnam !
Accompagné de deux employées de la Maison de Montpellier, je retourne ensuite dans leurs bureaux où m’attendent d’excellentes pâtisseries européennes achetées spécialement pour moi ! Quel délice et quel bonheur ! La directrice n’était pas disponible pour me rencontrer ce jours là mais je suis de nouveau convié le lendemain et le surlendemain pour rencontrer des journalistes de la TV et de la presse provinciale du Sichuan. A ma grande surprise, c’est carrément une mini conférence de presse qui m’attend vendredi. Les journalistes assis en face moi me posent des questions en chinois et la directrice de la Maison de Montpellier traduit pour moi dans un français parfait. L’interview porte évidemment sur mon périple de Chengdu à Paris à vélo mais aussi sur ce que je pense de Chengdu d’un point de vue touristique, sur les points communs entre Chengdu et Montpellier, etc…
Remise en état du vélo et visite de Chengdu
Après avoir terminé de publier mon article sur la Traversée du Tibet à vélo, je me mets en quête d’une boutique pour réparer mon vélo dont les roues avaient durement soufferts des pistes en mauvais état dans les montagnes entre le Tibet et Chengdu. Je trouve sur internet une boutique tenues par deux américains qui semble réputée. J’amène mon vélo et au premier coup d’oeil, le gérant m’indique que mon pneu arrière est déformé et doit être remplacé. En revanche, il ne décèle aucun souci sur ma roue avant. Je rentre à la guesthouse et substitue le pneu déformé par mon pneu de secours que j’avais prévu au cas où…!
Xiao Dong, mon camarade de route chinois avait « spammé » tout Baidu (le Google chinois) et les réseaux sociaux de cyclistes chinois. Si bien qu’avant même d’être arrivé à Chengdu, je suis contacté par Gougou et Eileen qui habitent ici. Gougou m’aide à réparer mon vélo et m’emmène également chez un de ses amis qui travaille dans un shop de vélo. Cet ami propose de laver et vérifier gratuitement mon vélo. J’accepte avec grand plaisir et suis encore surpris de cette grande générosité chinoise. Quant à Eileen, elle me fait visiter le quartier tibétain de la ville ainsi que quelques spécialités gastronomiques locales.
A la guesthouse, je suis également bien entouré. Xu est le manager bénévole de la guesthouse. Il parle bien anglais et fait de son mieux pour comprendre la culture occidentale. La cohabitation entre chinois et occidentaux n’est en effet pas évidente. Un couple franco-portugais habite temporairement une chambre de la guesthouse depuis un mois et se bat pour instaurer une hygiène convenable dans la guesthouse. Si la générosité et l’accueil sont de grandes vertus des chinois, l’hygiène leur est totalement inconnue. Faire la vaisselle, uriner uniquement dans les toilettes à la turque, ne pas cracher sur la moquette, jeter les aliments moisies, nettoyer de temps en temps la cuisine et la salle de bain… semblent être des requêtes totalement inaccessibles et parfaitement inutile pour des chinois. Xu fait de son mieux pour améliorer l’hygiène dans la guesthouse.
En fin de semaine, un européen arrive et il s’avère être français. Il travaille pour Airbus à Beijing. Au moment d’ajouter son contact sur mon téléphone, quelle n’est pas ma surprise en lisant le premier nom s’affichant : ma cousine Agathe ! Quelle coïncidence ! Xavier a fait la même école qu’Agathe à Paris puis ils sont tous les deux partis en échange universitaire 1 an en Chine. Agathe travaille chez Airbus en France alors que Xavier est resté expatrié en Chine. Le monde est petit…
En train pour le Nord-Ouest chinois
Je mets le cap à l’ouest pour de bon. Jusqu’à présent je me baladais en faisant un tour d’Asie du Sud Est puis en faisant des détours en Chine tantôt à l’ouest tantôt à l’est pour visiter le Tibet et faire connaissance avec la chaine de l’himalaya puis pour faire un stop à Chengdu. Presque trois mois après avoir débuté mon expédition à vélo, il est temps de commencer à mettre le cap vers la maison : l’Europe.
J’aurais voulu prolonger les tour de pédales en Chine pour visiter la région du Xining et notamment son grand lac. C’est la saison idéale en ce moment et tous mes amis chinois et voyageurs m’ont recommandé cette magnifique région. Malheureusement il ne me reste que 2 semaines pour parcourir quelques 4000km. Le train s’impose donc.
Je devais initialement partir samedi mais on m’indique la mauvaise gare, je perds du temps et toutes les places assises sont déjà réservées dans le train de samedi. Pour 49 heures de train, il est difficilement envisageable de rester debout… Je prends donc mon billet pour dimanche.
Les trains chinois bondés… quelle aventure !
Ce weekend était férié en Chine à l’occasion du Dragon boat festival. Le train est bondé est par souci d’économie je n’ai évidément pas réservé de couchette malgré les deux nuits que je passerai à bord. J’espérais que le train ne soit pas trop plein pour pouvoir m’allonger sur une banquette. Vers 3 heures du matin, je tombe de fatigue et je finis par faire comme certains chinois : m’allonger sur le sol à moitié dans le couloir, à moitié sous une banquette. Je prie pour ne pas m’allonger là où les chinois avaient répandu leur crachat la veille mais j’essaye de faire abstraction. L’essentiel est de m’allonger et de dormir un peu.
Arrivée à Urümqi (prononcer Urümchi)
Après presque 3 jours dans le train, me voici arrivé à Urumchi à environ 700 km de la frontière Kazahk. Je m’apprêt à récupérer mon vélo mais il n’est pas encore arrivé à l’entrepôt de fret. Après 1h d’attente, le personnel m’informe que mon vélo voyage dans un train de marchandise dédié et que ce train n’arrivera que dans la soirée.
J’imaginais quitter la ville rapidement pour pouvoir camper dans la nature mais je dois maintenant revoir mes plans et chercher un hôtel. Problème : à Urumqi, seuls certains hôtels sont autorisés à héberger des étrangers et ces hôtels sont généralement hors de prix… Mes amis chinois de Chengdu m’aide à chercher et passent quelques coups de téléphones mais la réponses est toujours la même : « nous n’acceptons pas d’étrangers ». Un ami me conseil de tenter warmshower, un réseau d’hébergement à domicile gratuit pour cycliste. Par chance, une heure après avoir lancé mes bouteilles à la mer sur le site warmshower, je reçois une réponse positive.
Mais l’aventure continue…!
Je réceptionne enfin mon vélo vers 19h et me mets en route en direction de mon hébergement. Je finis par trouver après avoir tourné pendant 1h30 mais aucune trace de mon hôte. Je demande à des personnes croisées dans la rue de l’appeler pour lui demander l’emplacement exact. Il ne comprends pas bien l’anglais mais il semble ne pas très bien voir où je suis et je ne comprends pas non plus ses explication. Il explique en chinois au propriétaire du téléphone qui m’explique ensuite en chinois toujours la route à suivre. Visiblement je ne suis pas du tout au bon endroit mais pourtant je suis aux bonnes coordonnées GPS…
Après 4h de recherches à travers la ville, fatigué de mes 3 jours de train sans sommeil et de ma journée sans manger, j’arrive enfin chez mon hôte vers 23h30. (Il aura fallu qu’il aille me chercher en taxi!). Je m’aperçois que les coordonnées qu’il avait indiqué sur warmshower étaient faux. Il habite en réalité à 6km de là… Je ne risquais pas de trouver…
Mon hôte héberge également un cycliste malaisien Yuu, qui se dirige tout comme moi
vers l’Europe !
En route vers le Kazahkstan
Le lendemain matin, je change quelques Yuan en monnaies Kazahk et reprends la route vers le Kazahkstan. Il reste à peu près 700km pour atteindre la frontière.
Les premiers 300km ne sont pas très intéressants car assez plats et monotones mais les paysages deviennent magnifiques au bout de 4 jours. Je pédale toujours sur l’autoroute mais suis entouré de part et d’autre de magnifiques montagnes. Les régions traversées sont assez désertiques. Il n’y a ni arbres, ni habitations et le sol est généralement sablonneux. Le paradis pour camper : en fin de journée, il me suffisait de quitter l’autoroute et de planter ma tente derrière une butée ou quelques arbustes.
Le fait de traverser de grandes zones désertiques fait que j’ai fait moins de rencontres sur la route que dans les autres régions de Chine. Malgré tout j’ai été invité un après-midi à prendre le thé chez un local d’une trentaine d’année qui travaille dans une administration. En discutant avec lui j’ai un peu mieux compris la situation dans le Xijiang et l’esprit d’indépendance qui y flotte. Il m’a expliqué qu’il y a une très forte communauté Houigour dans cette province et que la Chine est assimilée à un colon. Une partie de la population utilise le fuseau horaire traditionnelle du Xijiang mais officiellement le fuseau horaire est le même pour toute la Chine et est fixé par Pékin (+2h). C’est assez perturbant car certains ont leurs pendules à l’heure chinoise et vivent à l’heure chinoise et d’autres vivent avec deux heures de retard (repas, ouverture des commerces, lever et coucher). Il m’a également partagé son point de vue sur les chinois. Selon lui, le peuple chinois est mauvais, malhonnête, sans valeurs ni religions. C’est amusant comme on peut fréquenter et vivre avec un peuple et pourtant le connaitre si mal… Je pourrais lui prescrire un voyage à vélo en Chine, il s’apercevrait très vite que ça description du chinois ne correspond pas du tout avec la réalité.
Malgré tout, je veux bien croire que la région dans laquelle il vit est plus complexe que le reste de la Chine. Il y a quelques années, il a d’ailleurs été blessé par un kamikaze alors qu’il surveillait un checkpoint de police pendant son service militaire.
3 jours dans une Yourte autour du lac Sayram
Avant de quitter la Chine, je voulais camper une journée ou deux autour du lac Sayram à 2000m d’altitude et à quelques kilomètres de la frontière. Malheureusement la météo est très mauvaise : il pleut et il fait moins de 10 degrés en pleine journée. C’est un choc puisque la veille j’avais encore des températures proches de 35°c. Je cherche à sortir de la zone touristiques pour planter ma tente sur le bord du lac en pleine nature mais je me heurte à une barrière et à un péage. On me demande 10€ de mémoire pour pouvoir entrer dans la « réserve naturelle ». C’est évidement hors de question que je paye quoique ce soit pour pouvoir planter ma tente dans la nature. On me propose plusieurs fois de payer pour dormir dans une yourte mais je refuse aussi et j’installe ma tente avant la zone protégée et à ce moment des gens viennent vers et me propose de planter ma tente dans leur champs à côté de leur yourte pour éviter la tempête annoncée la nuit suivante. Après avoir compris que je viens de Thaïlande et me dirige vers l’Europe à vélo.
Dernière journée en Chine avec deux amis chinois rencontrés à proximité de la frontière.
Je vous écris depuis Bishkek au Kirghizistan où je suis arrêté depuis plus d’une semaine en attente de mes prochains visas. Dans mon prochain article, je vous parle de ma (rapide) traversée du Kazahkstan et de mes 3 premières semaines au Kirghizistan ! A bientôt pour de nouvelles aventures !
PS : Pour ceux qui veulent me donner un coup de main (ou de pédale?), vous pouvez faire un don via la cagnotte en ligne ou par chèque (me contacter). Les visas pour les pays d’Asie Centrale coûtent entre 60$ et 130$ chacun ce qui entraîne de grosses dépenses ce mois-ci…
Et un grand merci à ceux qui m’ont déjà aidé financièrement ! Si je peux continuer ma folle aventure, c’est grâce à VOUS ! 🙂
Isa
Hello Pierrade !
Merci pour toutes ces nouvelles photos superbes, ! La tente est vraiment top pour le camouflage !
Nous rentrons de la cousinade à la Folie, nous avons eu bien chaud, 30°, et je me demande comment tu peux pédaler avec tout ton chargement sous des chaleurs bien plus fortes encore !!!!
Il en faut du courage et de la volonté. Quelle arme !
Ton visa iranien nous montre ton nouveau visage : barbe rasée et cheveux coupés… et sans lunettes !
Bonne route, et sois prudent.
isabelle
Toujours intéressant. Pour les chinois, ton témoignage est différent de ce que j’avais pu lire. Peut être es-tu en contact avec des jeunes ou des personnes désireuses de contact. Et puis tu es occidental et non tadjik. la xénophobie ça existe !
Comme en Hongrie nous avions été accueillis à bras ouverts par des familles et des femmes, mêmes âgées, alors que des jeunes m’ont dit ne pas avoir pu avoir de contact sympa avec les gens croisés.
Nous attendons avec plaisir la prochaine publication.
CATHOU FRADIN DE LA RENAUDIERE
JE SUIS CATHOU, LA FEMME DE GIGI, COUSIN DES MONGIN ET DE TES CHERS PARENTS.ISA M’A FAIT DéCOUVRIR TON AVENTURE FANTASTIQUE. BRAVO POUR TES TOURS DE PEDALES, TON ITINéRAIRE PASSIONNANT ET TA SANTé DE FER.
JE SOUHAITE SUIVRE LA SUITE DE TON RETOUR….AVEC PASSION.
GIGI ET MOI HABITONS MONTPELLIER…..ET SI TU AS BESOIN DÊTRE LOGé A TON RETOUR, TU VIENS CHEZ NOUS!