Je vous racontais dans mon précédent post mes deux premières semaines au Kirghizstan à travers une nature verdoyante et autour du lac paradisiaque de Issyk-koul. Voici la suite de mes aventures au Kirghizstan qui commence par un trek d’une semaine dans le Nord du pays !
Invité via couchsurfing pour un trek d’une semaine !
Vous connaissez peut-être Couchsurfing, le site communautaire d’hébergement bénévole. J’avais envoyé des demandes d’hébergement car je devais rester à Bishkek plus longtemps que prévu pour les demandes de visas. Plusieurs personnes m’ont proposé de m’accueillir mais j’ai également reçu une offre inattendu me proposant de partir visiter le Kirghizstan en trek d’une semaine. Taalai et son beau frère partent souvent en trek à travers la région et c’est également l’occasion pour eux de rendre visite à toute la famille…
Mes problèmes de visas ne me laisseront malheureusement pas assez de temps pour traverser le pays à vélo du nord au sud mais ce trek va me permettre de découvrir au moins autant le Kirghizstan que si je l’avais traversé entièrement à vélo !
Le fameux lac de Son-koul
Nous partons donc de Bishkek en 4×4 en direction du lac Son-Koul. Après une grosse demi-journée de route et parfois de pistes de cailloux à travers les montagnes, nous arrivons après minuit au bord du lac Song Koul. Dans l’obscurité, nous cherchons pendant un long moment des yourtes où nous pourrions passer la nuit. Nous croisons un nomade errant totalement ivre sur son canasson. Nous le recroiserons dans le même état au petit matin d’ailleurs. Puis nous finissons par trouver des yourtes ouvertes aux touristes. Tout le monde y dort et nous devons réveiller le propriétaire, qui de mauvaise grâce, nous ouvre sa plus petite yourte. Il refuse de nous servir à manger à cette heure là mais ce n’est visiblement pas un problème pour mes hôtes kirghize qui sortent aussitôt une bouteille de vodka en m’expliquant que le vodka est la solution à toutes les situations périlleuses (ne riez pas!).
Le lendemain matin, nous nous levons vers 5h pour profiter du lever de soleil pour prendre des photos. Oui la nuit a été courte! Puis nous reprenons la voiture pour prendre le petit déjeuner dans d’autres yourtes sur la rive nord du lac. Sur la piste, nous croisons déjà un cyclovoyageur matinale et des campeurs.
Le petit déjeuner est délicieux. On nous sert du thé, une sorte de poridge de riz, une omelette, de l’Ayran (lait de vache fermenté faisant penser au lait ribot pour les bretons!), des fruits pressés servis comme confiture, de la crème de lait et différentes sortes de beurres à étaler sur le pain.
Après une bonne baignade dans le lac, nous reprenons la route vers Naryn puis At Bashi. De là, nous nous enfoncerons dans les montagnes pour rejoindre des membres de la famille qui vivent entre deux montagnes éloignés de tout et relié à la civilisation que par une piste boueuse praticable que par beau temps. Il y a plusieurs passage à guai franchir et cela n’est possible que lorsqu’il n’a pas plus les deniers jours et que la rivière n’est pas trop haute.
En arrivant, nous découvrons que la famille venait de finir de démonter leur yourte dans l’idée de déplacer le campement. Ils n’avaient pas reçu les messages annonçant notre venu. En effet, il n’y a du réseau que sur le sommet d’une montagne et évidemment ils n’y vont pas tous les jours. Nous devons donc remonter la yourte ce qui prend un peu plus d’une heure. A l’intérieur, c’est confortable. Le sol est encore humide des dernières pluies mais on étale des tapis ce qui nous permet de nous assoir par terre. La yourte est circulaire avec une petite lucarne que l’on peut ouvrir le jour pour laisser rentrer la lumière et l’air. On se chauffe grâce à poêle au charbon ou plus généralement à la bouse de moutons séchée qui est un excellent combustible et qu’on trouve abondamment dans la montagne contrairement au charbon. Le poêle sert également à cuisiner…
Que mangent les nomades ?
Du mouton, du mouton et encore du mouton ! Difficile pour les nomades de cultiver des fruits et légumes puisqu’ils ne restent jamais longtemps au même endroit. De toute façon, le climat de la montagne est trop rude pour pouvoir espérer faire pousser des légumes… Par conséquent, le régime alimentaire des nomades kirghize se limite généralement à de la viande provenant de leurs troupeaux de moutons et parfois vaches et chevaux.
Une exception est parfois faite au petit déjeuner où on peut manger du pain avec du lait, de la crème de lait et du beurre fait maison. Pour le déjeuner et le diner, chacun se verra servir environ 1 kg de mouton dans son assiette et devra se débrouiller pour faire le tris entre le gras et la viande. Bien sur, on y met les doigts, il n’y a pas de fourchette !
Comme j’étais l’invité, la tradition kirghize veut que tous les voisins m’invite également dans leur yourte et m’offrent à manger. Dès mon deuxième jour dans le campement, j’entamme donc le tour des yourtes et je m’assois une petite heure dans chacune d’elles pour manger et faire honneur à la tradition. On m’offre du pain, du beurre… et évidément le kilo de mouton. Difficile d’enchainer tous ces repas mais je fais de mon mieux. On tente aussi de me servir du Kumouss mais je décline en prétextant que mon estomac ne supporte par cette boisson (ce qui n’est pas totalement faux d’ailleurs). Cette boisson légèrement alcoolisée est une fierté nationale. On la prépare à partir de lait de jument qu’on laisse fermenter une journée dans une grande poche de cuire. S’il est possible de boire la boisson d’une traite en coupant sa respiration, le pire reste à venir ensuite. Un goût amer et très étrange reste en bouche… Heureusement, j’ai rapidement trouvé la parade à cette boisson : demander de l’Iran (pronnoncez Aïe-ran). Cette boisson à base de lait de vache fermenté est bien meilleure en y ajoutant beaucoup de sucre. Son goût rappelle le lait ribot breton.
La vie de nomade
Pour les nomades, l’année se divise en deux parties : la saison estivale dans les montagnes pour emmener paitre les troupeaux et la saison hivernale au village dans la pleine.
Je leur ai rendu visite en plein mois de juillet. Les enfants sont en vacances et s’occupent de garder les troupeaux toutes la journée. Ils partent le matin à dos d’âne accompagnés de chiens et emmènent les quelques 800 moutons sur les sommets pour brouter l’herbe. Ils rentrent à la tombée de la nuit pour diner en famille et dormir. Le père les accompagne parfois lorsqu’il n’a pas à s’occuper de tuer ou soigner un mouton, ou réparer/installer un inclos, fabriquer des toilettes, etc… Quant à la mère, elle s’occupe de traire les juments et les vaches, de préparer à manger et elle surveille également le nouveau-né.
Lorsque la nuit tombe, il est temps d’aller dormir puisqu’il n’y a pas d’électricité autre que les lampes torches. On dort tous sur des fins tapis/matelas étallé sur le sol de la yourte. On est serré mais ça permet de se tenir chaud une fois que le poêle se sera éteind au milieu de la nuit. Avec tous les enfants et cousins, nous sommes une petite quinzaine et la yourte n’est pas assez grande pour accueillir tout le monde. Les garçons vont dormir dans une petite tente de stockage à côté de la yourte. Dans cette tente il n’y a pas de chauffage ni d’isolation, c’est bien moins confortable que la yourte.
Atelier fabrication de beurre
La veille, j’avais fait une tentative infructueuse de traite de jument. Il parait que je stressais la jument, ce qui l’empêchait de donner du lait. Il semble que les chevaux soient moins stupides que les vaches et ne se laissent pas aussi bien traire ! Surtout par un inconnu… Il paraîtrait même que la jument ait ainsi « on n’a pas gardé les vaches ensemble »… Bref.
Aujourd’hui, nouveau challenge, utiliser une machine ancestrale pour séparer la crème du lait pour ensuite en faire du beurre. Rien de compliquer, il suffit de tourner une manivelle pendant une bonne heure à un rythme constant. Trop rapidement ou trop lentement, la qualité de la crème serait réduite. La fermière est très satisfaite de mon tournage de manivelle et je reçois ses félicitations. Elle est très contente aussi parce que je lui libère une grosse heure dans son planning de la journée !
Inauguration de douches et toilettes et repas d’Adieu
C’est la grande actualité de l’été dans la montagne. Un voisin de l’autre côté du versant de la montagne vient juste de recevoir un container sanitaire avec douche et toilette ! C’est le grand luxe et tout le monde en parle. Le voisin en question a d’ailleurs invité tous les voisins à 10km à la ronde à venir célébré cette nouvelle acquisition unique dans la région ! Pour l’occasion, des moutons seront tués et offert en festin. Finalement nous partons avant qu’ait lieu cette fête. Je crois que c’est pas plus mal d’ailleurs!
Mais ne vous inquiétez pas, j’aurai ma dose de viande ! Nous précipitons notre départ car des orages sont prévus et la route risque d’être inutilisable dans les prochaines heures. Juste le temps de fêter notre départ en égorgeant deux moutons. On me laisse l’honneur de m’en occuper mais je décline la proposition, c’est trop d’honneur ! Le fermier s’en occupe et le midi nous festoyons avant de reprendre la route après avoir engloutis les deux moutons en compagnie de quelques voisins.
Pèlerinage familiale
Au Kirghizstan, dans les « stan » en général et probablement dans tous les pays musulmans, la famille est très importante. La plupart du temps 3 ou 4 générations vivent sous le même toit.
Taalai m’explique que nous rentrons à Bishkek mais qu’avant nous avons une petite dizaine de halte à faire chez chacun des membres de la famille plus ou moins éloigné. La politesse oblige à s’arrêter chez tous les membres de la famille plus âgés que soi. Passer dans la région en oubliant un membre de la famille serait très mal vu. Heureusement nous pouvons squezzer les plus jeunes !
A chaque fois, nous nous arrêtons 1 heure ou 2 et on nous offre à manger puis nous repartons. Nous dormons dans l’une des familles avant de continuer le pelerinage encore toute la matinée. Nous finissons finalement au cimetière pour nous recueillir devant la tombe des grands parents -très appréciés- par toute la famille avant de nous diriger pour de bon vers Bishkek.
Départ vers le Tadjikistan
Nous arrivons tard à Bishkek et dès le lendemain je veux partir au plus tôt en taxi pour le Tajikistan. Je n’ai pas encore reçu de réponse pour mon visa de transit turkmène mais je n’ai plus le temps d’attendre et de toute façon si ma demande est acceptée, ils m’enverront le visa à l’ambassade du Turkmenistan à Dushanbé (Tadjikistan).
Taalai et moi allons réserver un taxi collectif près du bazzar. Le chauffeur devra trouver au moins un autre client avant de pouvoir partir. Vers 19h, il est prêt mais il s’aperçoit que sa voiture est trop petite pour pouvoir accueillir mon vélo et les bagages. Et il n’a pas de barres de toit. Nous devons donc attendre un nouveau taxi capable de transporter mon vélo. Il arrive vers 21h et j’entame la longue route vers Osh dans le sud du pays à quelques km de la frontière tadjik. La route n’est pas trop mauvaise mais le chauffeur somnole alors que le passager arrière ronfle bruyamment après avoir engloutie une bouteille de vodka. Je suis à l’avant et m’empêche de dormir au cas où je devrais donner un coup de volant précipitamment. Le chauffeur à plusieurs fois failli se prendre un camion de face…
Au petit matin, il décide de me déposer avant la destination finale et s’arrange avec un autre taxi pour le reste de la course. Je refuse de descendre avant de clarifier le deal, je ne voulais pas payer deux fois. Finalement, nous transférons le vélo et bagages dans le nouveau taxi et tout se passe sans problème.
A Osh, je suis accueilli par Kaparali, un collègue de la femme de Taalai. Il ne parle pas un mot d’anglais mais m’accueille les bras ouverts et me fait visiter la ville en voiture et à pieds, quartier après quartier, monument après monument ! Au bazzar, il m’offre aussi quelques souvenirs et chapeaux traditionnels Kirghize. Le lendemain matin, il m’emmène changer mon argent en monnaie tadjik et tient absolument à m’offrir un peu d’argent à surtout à me payer le taxi sur les 70 prochains km car il explique que la route est difficile et montagneuse. Je refuse mais il m’explique qu’en tant que musulman c’est son devoir et que je dois accepter son cadeau ! Taalai sert d’interprète par téléphone et me confirme que je dois accepter.
Me voilà donc reparti en taxi et même si je suis un peu gêné de cet excès de générosité, je dois dire que ça me rend bien service et me fait gagner de précieux jours. Je suis toujours lancé dans une course contre la montre à cause de l’expiration de mes visas.
Le taxi me dépose sur la grande route à 80 km de la frontière et je remonte, revisse mon vélo, pédale quelques kilomètres avant de me faire klaxonner et qu’une voiture s’arrête à mon niveau. Je retrouve l’un des passagers du taxi, cette fois au volant de sa voiture. Il me propose de monter et de m’avancer encore de 40km. J’accepte avec plaisir! Encore une journée de vélo de gagner car sa monte à 3000m par ici.
Me voilà à Sary-tash, la porte du Pamir. J’achète des provisions et m’élance vers le poste frontalier Tadjik encore à une trentaine de km de piste ! Je ne croise plus de voiture et la route goudronnée se transforme rapidement en piste de terre et cailloux. La grande aventure sur la route la plus haute du monde peut maintenant commencer ! Ma traversée du Pamir dans le prochain épisode ! 😉
isabelle
Toujours impressionnant de te voir traverser ces pays qui font un peu partie des rêves d’enfants. Mais c’est le chien qui m’a le plus marqué : il a un regard humain.
On continue de bien penser à toi et de prier pour toi, que Dieu te protège.
Isabelle et Xavier
HANS Catherine et Philippe
Cher Pierre Adrien,
Nous suivons avec beaucoup d’intérêt ton extraordinaire voyage. Encore BRAVO.
Comme ces gens semblent très accueillants.
Bravo pour tes magnifiques photos.
Il te faudra nous les expliquer à ton retour.
Nous pensons bien à toi et t’envoyons nos plus affectueux baisers.
Bonne route
Catherine et Philippe
Mongin
Cher Pierre-Adrien,
Que d’aventures, que d’aventures dans ce dernier « report ». En plus de cela, de l’exotisme, des nombreuses spécialités culinaires et de boissons, des us et des coutumes, des peuples, des pays, des maisons aussi différents et aussi riches d’enseignement les uns, que les autres, à la découverte de civilisations nouvelles et particulières.
Nané et moi-même, ton Oncle Antoine, continuons à nous dire, que c’est très bien, ce, que tu fais et ce, que tu vis là, loin de tes bases, afin d’être.
Voilà la maxime du jour : « Nous allons vers l’Est, quand il faut comprendre l’Histoire, étudier l’Art et la Littérature, en remontant les traces de notre race. Nous allons vers l’Ouest comme vers l’avenir, avec un esprit d’aventures et d’entreprises ». Henry David Thoreau (« Marcher »)
Bon vent, Cher Pierre-Adrien,
Très affectueusement,
Nané et ton Oncle Antoine
Thierry
Sacré Pierrade,
Toujours aussi passionnante cette aventure, ma femme et moi nous régalons vraiment à chaque post. Merci encore de nous faire découvrir le monde.
Vivement la suite…
Marie-Gilles jourdain-Simonneaux
Merci Pierre Adrien de nous faire profiter de tes exploits, de ton parcours, de ton incroyable aventure …nous avons un peu l impression de voyager aussi c est super…mais sans efforts pour nous! Nous découvrons des pays et paysages peu familiers , des sourires, des tenues vestimentaires, des habitations …
Bravo et merci!
Bonne continuation
Margilie
quintin monique
Pierre adrien
nous suivons avec passion émotion et admiration ton merveilleux périple
tes photos tes récits permettent de suivre et de vivre tes aventures dans très belles contrées qui nous font rêver
bravo et merci de nous le faire partager
monik