La côte Croate en vélo

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28/01/2017 – Je quitte définitivement le Monténégro et commence ma longue traversée de la Croatie en longeant la côte. Ce pays me réservera de beaux paysages mais une hospitalité encore très timide. 

Passage de la frontière de nuit

Non pas que je veuille franchir la frontière clandestinement de nuit, mais je me suis laissé rattraper par la nuit. Après déjà plus de 100km roulés depuis le matin et un bon détour le long du lac de Kotor, je m’aperçois qu’il me reste encore 30 km pour rejoindre mon hôte côté Croatie. Plus je me rapproche de la frontière, plus la route s’incline et plus l’effort devient rude. Je passe un premier poste frontière et quitte officiellement le Monténégro. Il fait maintenant nuit noir et je circule dans un no man’s land entre le Montenegro et la Croatie. La route monte encore, coincée entre la vallée et la falaise. Mon phare arrière ne fonctionne plus, les câbles électriques ont été rongés par le sel épandu sur les routes verglacées. Les rares voitures me klaxonnent. Après une demi-heure de grimpette dans cette montée interminable, j’aperçois enfin le poste frontière Croate. Les douaniers contrôlent rapidement mon passeport et je passe sans encombre en quelques secondes.

Je pensais en avoir terminé pour la journée avec les montagnes. En réalité, je ne fais que commencer. Il fait nuit noire et seule de rares voitures éclairent la route et les arbres du bas-côté. Je m’éclaire à la lueur des phares et du vélo mais en montée, je dois rapidement utiliser ma lampe frontale. La route ou plutôt la piste aménagée dans la montagne monte tout droit vers le sommet. Même sur la plus petite vitesse, mon vélo grimpe très difficilement et les pneus patinent sur le mauvais revêtement. J’hésite à pousser le vélo mais je m’aperçois que c’est encore plus compliqué de pousser les 60 kg à la main. Mes pédales avaient montré quelques signes de faiblesse la veille. Je leur donne leur coup de grâce dans cette montée. Elles grincent, se bloquent et ne sont pas loin de tomber. Finalement j’arrive au sommet et atteins la maison de mon hôte warmshower qui m’accueille par de grands cris d’enthousiasme en me voyant arriver en haut !

Les récits du papy

Malgré son vieil âge, mon hôte croate s’exprime dans un parfait anglais populaire. Il a de nombreuses histoires à raconter. Notamment ses rêves de jeunesse de quitter l’URSS et d’aller découvrir le monde occidental. Il s’est enfui une première fois en prétendant être un réfugié politique et arrive à Paris après avoir voyagé clandestinement dans un train de fret. Arrivé à Paris, il pense passer inaperçu mais lorsqu’il cherche à quitter la gare, il se fait attraper par la police. Surpris par le flair des agents de la police française, il leur demande comment ils ont fait pour l’identifier aussi rapidement. Puis il s’aperçoit que son visage est couvert de charbon après avoir voyagé dans le train de fret. Arrêté, il va être reconduis à la frontière. Il fait part à la police de son rêve le plus cher et de sa dernière volonté avant d’être reconduit à la frontière : visiter Paris.

Sa dernière volonté est accordé et on lui donne une semaine pour visiter Paris. Il est accompagné en permanence par une volontaire de la Croix Rouge qui lui fait visiter les moindres détails de la capitale française. A la fin de la semaine, il repart en URSS mais il n’a pas dit son dernier mot. Il reviendra en France clandestinement avant de s’embarquer pour le Canada. Là-bas, il travaillera pour de riches familles. Il améliorera son quotidien en volant dans les gardes-manger. Selon lui, voler pour survivre n’est pas voler. Conception pour le moins discutable ! Aujourd’hui, il a installé sur un terrain hérité de sa famille, des mobilhomes ramenés du Canada. Il produit sa propre électricité à partir de panneaux solaires et vit en quasi-autarcie mais il accueille chaque semaine les voyageurs -cyclistes ou autres- qui passent par la région. Établi sur un flanc de montagne, son terrain a des airs de paradis. Les voyageurs qui y passent entretiennent le parc et construisent cabanes et chalets !

Départ pour Dubrovnik : tentative échouée

Après une nuit de camping dans un mobilhome servant d’atelier, me voilà prêt à repartir. Mon hôte me dit au revoir car il a un rendez-vous « pêche ». Je termine de manger et de préparer mon vélo. Je suis prêt à partir mais m’aperçois au dernier moment que mon manteau et casque de vélo sont restés dans le mobilhome fermé à clef. Je n’ai pas d’autres choix que d’attendre le retour du pêcheur et de rester une nuit de plus !

En route pour Dubrovnik

Le lendemain soir, après une journée de vélo, j’arrive finalement dans la magnifique ville de Dubrovnik. Par miracle, mes pédales tiennent toujours malgré des grincements de plus en plus stridents. J’aperçois sur la route un garage auto qui semble commercialiser également des vélos mais il n’a pas de pièces de rechange. Il me donne l’adresse de l’unique boutique de vélo de Dubrovnik. En réalité, la boutique fait aussi office de garage auto mais le gérant a bien une paire de pédales qui devrait me dépanner pour les prochains kilomètres.

Dubrovnik la magnifik

A Dubrovnik, j’ai trouvé une guesthouse pas trop cher. Malgré la fatigue de la journée, je me précipite pour prendre une douche avant de sortir visiter la vieille ville. Il est 17h et le soleil est encore chaud. On se croirait au printemps voir en été ! Quand je pense que 10 jours plus tôt, j’étais sous la neige avec des températures 20 degrés sous zéro !

Je visite la ville et le port avec un backpacker hollandais qui s’apprête à visiter les Balkans sur une semaine. La météo est parfaite et la ville absolument magnifique. Dubrovnik rappelle un peu l’architecture italienne et certaines façades font clairement penser à Venise.

En route vers le nord

Le lendemain il est temps de reprendre la route et de quitter le confort de la guesthouse. La météo est bonne et les paysages superbes. Je repars à l’assaut de la côte très montagneuse de la Croatie en direction du Nord. Les paysages sont magnifiques et au fil des jours la route devient moins montagneuse. Le premier soir, je campe sur une aire de pic-nic sur le bord de la route. Il fait sombre et je suis relativement bien caché sous un arbre. Le trafic routier s’arrête progressivement.

Le deuxième soir, je m’arrête sur une sorte de plage bordée de maisons. J’aperçois une maison abandonnée avec un terrain parfaitement adapté pour ma tente. Je frappe chez les voisins et une femme m’ouvre la porte. Je la préviens de mon intention de planter ma tente sur le terrain en friche mais elle me conseille plutôt de m’installer sur la plage. Le vent et l’étroitesse de la plage ne me mettent pas en confiance. Je décide de me rapprocher du terrain en friche avant de m’installer finalement dans le rez-de-chaussé de la maison en construction voisine. Le chantier semble abandonner depuis longtemps et la maison sert d’abri pour des casiers de pêche. Au bout d’un moment j’aperçois de la lumière de la maison mitoyenne dont j’avais frappé la porte. En réalité, la maison où je campe n’est pas si inhabitée que je l’imaginais. Je mange donc en silence en masquant ma lampe de poche et me couche sans déplier ma tente.

Au petit matin, je ramasse rapidement mes affaires et reprend la route. Les conditions météo sont bonnes et malgré une route encore très montagneuse, j’avance vite grâce à un petit vent de dos qui me pousse. Le soir j’arrive chez Juré et Yvonne, un couple de locaux qui ont déjà hébergé Juan, le cycliste espagnol rencontré en Grèce. Je suis donc attendu et passerai 2 nuits dans un studio mis à ma disposition. Mes hôtes m’ont invité à partager leur déjeuner. Je me serais presque cru à la maison! Plus je me rapproche de chez moi, plus la culture locale me semble familière. La maison est organisée comme une maison française. La cuisine est équipée comme en Europe, on mange à table, assis. Dans le salon, un poêle moderne réchauffe la pièce. Sur la cheminée trône des icônes religieuses et une image du pape Français.

Chaque matin à 7h00, je suis invité au café du village par le président de l’association de cyclisme du village. Nous discutons de nos différentes expériences cyclistes et de vie.

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Les 3 jours les plus longs !

Après mes deux jours de pause, il est temps de reprendre la route. La route est un peu plus plate mais la météo devient rapidement mauvaise. Dès le premier jour de vélo, je dois affronter la pluie une bonne partie de l’après-midi. Les porteurs de lunettes savent comme la pluie est gênante. Le soir tombe, il pleut toujours autant, je n’y vois rien et après m’être fait refusé l’hospitalité dans des restaurants et maisons, je finis par m’arrêter dans un parc dépendant probablement d’un hôtel et zone résidentielle. Le terrain est détrempé mais je n’ai pas le choix. Je plante ma tente sous la pluie battante, mange rapidement quelques sandwichs et m’endors après avoir dégagée la crotte de chien sur laquelle j’avais eu la bonne idée de poser ma tente. La nuit est mitigée car il pleut dans la tente.

Le lendemain, il pleut toujours, des gens viennent promener leur chien autour de ma tente mais ils ne m’adressent pas la parole. Je plie la tente sous la pluie et reprends la route. Il va pleuvoir la majeure partie de la journée. Le soir, je longe toujours la côte. La route n’est absolument pas droite car elle suit les falaises et calanques. La route va probablement être fermée car le vent est annoncé très fort le lendemain et dangereux pour la circulation routière. Les locaux sont visiblement habitués à ce que cette route soit fermée la moitié de l’année. Il y a de moins en moins de village et habitation où m’arrêter. Au bout de 30mn j’aperçois finalement une petite ferme. Je frappe à la porte et au bout d’un certain temps, les fermiers entrouvrent leur porte. Malgré la météo et tous mes efforts de persuasion, il refuse de m’héberger et même de me laisser dormir dans un appentis à bois sous prétexte que la police viendrai les arrêter. Ils m’indiquent un village situé à 15km de là. Évidement il est impensable pour moi de rejoindre le village ce soir. Quelques kilomètres plus loin, une autre ferme. J’enjambe le portail et frappe à la porte. Après plusieurs secondes d’hésitation, ils finissent par accepter que je dorme dans le local à bois. Je ne tiens pas debout et il y a quelques infiltrations d’eau à l’intérieur mais ce sera toujours mieux que de dormir dehors avec une tente qui ne parvient pas à retenir l’eau. Avant d’aller me coucher, je frappe à la porte dans l’espoir de pouvoir me réchauffer quelques instants devant le feu. Mais les fermiers semblent ne pas comprendre. Ils ne me laissent pas rentrer mais me font signe de regagner ma cabane à bois.

 

Grand marathon : 1 jour / 3 pays

Ces derniers jours ont certainement été les plus éprouvants de tout le voyage. Je n’en peux plus psychologiquement. Cette pluie continue à eu raison de moi. Je cherche à quitter cette zone et à rejoindre l’Italie le plus vite possible. D’autant qu’un hôte warmshower m’attend juste après la frontière italienne. Je fais donc ma dernière journée en Croatie, grimpe jusqu’à la frontière Slovaque, traverse le pays en moins de deux heures et arrive finalement à Trieste après 130km parcourus dans la journée. Je n’ai pas pris beaucoup de photos ces derniers jours. A cause de la mauvaise météo d’une part et aussi parce que je cherchais juste à fuir la région le plus vite possible.

L’arrivée à Trieste sera mémorable mais je vous raconterai dans le prochain article !

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Pierre-Adrien Mongin est un jeune diplômé de Montpellier Business School. Il a décidé de consacrer une année de sa vie pour découvrir le monde et ses habitants à vélo. Parti de Bangkok en février 2016, il a rejoint Paris à vélo ler 1er Avril 2017 ! Un voyage merveilleux au fil des rencontres... Il est maintenant à la recherche d'une mission dans le marketing en tant que chef de produit ou chef de projet marketing digital. Aidez-le à continuer son rêve !

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